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VN#24 Les Alpes en commençant par la mer

Onze voitures, onze univers à rencontrer

Marie-Alix nous dépose en direction d'Apt et nous sommes déterminés à atteindre les Alpes Maritimes le soir même ! Nous parcourrons finalement près de 300 kilomètres sur les petites routes grâce à 11 conducteurs et conductrices : 2 jeunes qui voulaient monter un magasin de sport de glisse, un couple de médecins parisiens, Julien, vendeur de compléments alimentaires, Laetitia, designeuse aux 2 enfants franco-brésiliens qui a fait un détour pour nous montrer le moulin où elle va se balader quand elle a besoin de se ressourcer, Lucie l'instit passionnée de montagne, Theresa, franco-polonaise qui a passé sa vie aux USA, mère de 6 enfants et divorcée depuis un an, Marie-Ernelle qui était encore sous le choc d'avoir vu partir en fumée toute sa vie matérielle sur un terrain qu'elle affectionnait tant, puis Angélique, ancienne gérante d'un Lidl, en plein questionnement après avoir été victime d'un burn out et enfin un carreleur portugais plutôt "bien intégré" puisqu'il nous disait qu'il en venait à être raciste envers les Arabes avec tous ces attentats... Des tranches de vie qui transforment indéniablement un trajet en voyage et une journée en épopée !

Promenade niçoise

Il est donc 21 heures lorsque nous posons le pied sur la Promenade des Anglais en souhaitant une bonne soirée à notre conducteur lusitanien. Une nouvelle fois, nous allons devoir trouver l'hébergement en abordant les passants dans la rue. Avant de nous mettre à la recherche de notre hôte du soir, nous avalons deux saucisses de Toulouse et le reste de lentilles de midi. La longue journée nous a tout de même laissé assez d'énergie et nous sommes plus que jamais confiants alors même que Nice représente pourtant pour nous le sud-est et une population pas forcément facile à toucher avec notre projet. Durant les deux prochaines heures, nous allons arpenter le centre-ville à la découverte des ruelles, places et monuments et à la rencontre des habitants ! La première demande est pour Pierre-Elie, il la fait en anglais car Nice est une métropole internationale ! Le jeune homme ne peut pas nous accueillir car il vient tout juste d'emménager dans un petit appartement mais il nous encourage et nous confie qu'il prévoit également de partir en voyage prochainement. La marée humaine qui coule dans les allées niçoises nous encourage à continuer notre recherche. Nous nous écartons un peu de l'hyper-centre et Anouk aborde une femme à la veste colorée. Après la présentation du voyage et notre demande, notre interlocutrice nous répond qu'elle aurait bien aimé nous recevoir mais qu'elle prend un avion pour l'Allemagne cette nuit à 4 heures du matin ! Elle cherche tout de même une solution pour nous et passe deux coups de fil infructueux. "Je ne peux pas ce soir, mais je suis certaine que si vous continuez à demander avec cette même fraîcheur, vous allez trouver !" nous encourage-t-elle. Décidément, on en fait de belles rencontres sur un trottoir ! Les demandes suivantes sont également sans suite, un jeune couple ardéchois en vacances en airb'n'b, une étudiante partant en soirée et une touriste plutôt effrayée d'être ainsi abordée dans la rue. L'heure tourne. Toujours autant de monde dehors goûtant aux premières douceurs du printemps. Nous nous posons alors sur la place Masséna, la plus grande place de la ville, histoire de reposer nos jambes. En face de nous sur un banc, une fille roule sa prochaine cigarette. Nous nous regardons et pensons la même chose : ça va le faire ! Anouk se lève et va à sa rencontre pour lui expliquer notre voyage et notre quête du soir. La discussion se prolonge, puis elles reviennent vers les sacs. Aurélia est emballée par notre tour de France et veut nous aider. Alors nous nous entendons pour nous retrouver un peu plus tard, après la discussion qu'elle devait avoir avec une amie. Heureux d'avoir enfin terminé notre journée, nous nous baladons dans la ville, puis complétons le carnet de voyage et prenons le temps de discuter tous les deux d'autre chose que du voyage, ce qui n'est pas fréquent quand les journées s'enchaînent !

Week-end sur la Côte d'Azur Une fois chez Aurélia, nous organisons l'appartement pour pouvoir y séjourner à trois sans se marcher dessus, puis nous allons nous coucher, afin de recharger les batteries après cette longue journée sur la route. Le lendemain, nous prenons le temps de découvrir notre hôte. Aurélia est niçoise d'origine et a trois activités professionnelles différentes, mais toutes axées sur l'humain et le service à la personne. Elle nous explique comment elle voit son avenir, et un mot qui revient : trouver du sens dans ce qu'elle fait. Elle nous parle également d'un projet culturel sous forme associative. Elle se réjouit d'ailleurs de notre rencontre car nous lui partageons notre expertise du milieu associatif et coopératif pour des projets comme le sien. Après les grosses chaleurs de l'après-midi, nous rejoignons ses deux amis musiciens qui se sont installés sur la place Garibaldi pour un concert de rue de haute volée ! Puis nous grimpons tous les trois en haut de la colline du Château où se trouvent une cascade artificielle mais réellement rafraîchissante ainsi qu'un parc qui surplombe la capitainerie du port de Nice. Nous redescendons donc la colline par l'autre versant afin d'aller nous présenter dans cette nouvelle capitainerie. Le jeune homme à l'accueil nous explique qu'en cette saison, il n'y a quasiment pas de voilier qui fasse la traversée vers la Corse et que nous devrions plutôt attendre fin mai. Nous laissons tout de même un mot sur le tableau d'affichage pour faire connaître notre aventure autostoppesque, et peut-être bientôt, bateaustoppesque ? Sur le chemin du retour, nous fouillons avec entrain les poubelles d'un Naturalia que la gérante nous avait indiquées en guise de participation à Voyagez-Nous. La récup' est donc foisonnante : des pains, des bottes d'asperges, quelques citrons et poires, des radis, un pain d'épice et une multitude de pommes. Ce soir Aurélia, c'est risotto aux asperges et compote pommes-poires !

Remontée vers le Nord, le long des Alpes

Après ce week-end réussi, nous reprenons la route vers l'arrière pays niçois, ce qui signifie, en ce lundi matin, que nous marchons, longtemps, vers les collines. Avec nos petits sacs, les sorties de ville sont moins éprouvantes qu'au début du voyage, mais ce n'est jamais très agréable quand même. Finalement, un 4x4 nous avance un peu, sur l'embranchement de la petite route que nous visions, puis une conductrice, jeune retraitée de l'assistance sociale, nous conduit avec joie au prochain village et se passionne pour notre voyage. Nous atteignons le château de Tourrette-Levens avec le pizzaïolo du coin qui nous dit "j'ai du mal avec la modernité comme vous pouvez le voir" au volant de sa Coccinelle.

En repartant, nous rencontrons le boulanger qui termine sa journée et qui ramène des sacs remplis de petits pains aux graines. "Servez-vous, sinon après ça part aux poules !" nous dit-il alors qu'Anouk plonge ses mains dans le sac. Puis une maman nous avance à Levens en se réjouissant que sa fille ne soit pas là car "elle aurait aimé faire ce que vous faites mais je ne l'encourage pas trop" nous avoue-t-elle tandis que nous lui apportons notre témoignage après plus de 6 mois de voyage. Sur la route qui continue vers le Nord, nous ne voyons absolument aucune voiture passer alors que le soleil commence à taper fort. Au bout de 15 longues minutes, une voiture arrive à toute allure et c'est dans ces moments-là que l'on imagine un partenariat entre les autostoppeurs et les fabricants de plaquettes de frein. "Je trace pour éviter les chutes de pierres" nous explique notre conductrice entre deux virages en épingle. Le paysage est magnifique mais ce n'est pas une raison pour terminer dans le décor ! Nous rattrapons la route principale et elle nous laisse dans le village de Lantosque puisqu'elle tourne juste après. Nous pique-niquons et nous reposons avant de reprendre la route avec le responsable Afrique de l'école d'humanitaire BioForce, en vacances chez son frère. Aucun spot (endroit pour faire du stop) pour nous au carrefour et nous décidons de marcher un peu plus loin malgré le danger sur ces petites routes de montagne. Finalement, un troupeau de vaches en transhumance contient la circulation, assurant du même coup notre sécurité ! Une maman et son fils lycéen nous sortent ensuite des virages et nous arrivons avec eux à Saint-Martin-Vésubie, petite ville touristique du coin, que nous arpentons (surtout dans le but de trouver les toilettes publiques !).

Le chemin de la confiance A la sortie de Saint-Martin, Babeth s'arrête et elle-même ne sait pas vraiment pourquoi. C'est la première fois qu'elle "ramasse" des autostoppeurs. Et très vite, la "magie" opère ! Nous racontons notre voyage et elle nous raconte sa vie, entre la montagne et Nice. Son mari, ses enfants et ses difficultés à marcher quand le sol n'est pas plat. Elle tient à participer à notre voyage et nous propose de venir chez elle pour nous offrir une boîte de pâté. Nous hésitons un peu mais elle nous assure que ce n'est pas loin de la route principale. A 16 heures passées, il y a des petits détails qui comptent ! Finalement nous venons avec elle. Et arrivés dans le jardin, elle nous propose de dormir ici, et qu'elle peut nous prêter une tente. Nous rencontrons Jacky son mari, affairé au jardin. Nous sentons clairement qu'un premier stade de confiance est passé. Nous allons passer la nuit à Valdeblore. Et tant qu'à être à la montagne, nous exprimons notre désir de randonner avant que le soleil ne décline. Babeth demande à Jacky de sortir la tente de la cave et nous la déballons. Devant nous, un vieux modèle de tente, et l'esprit de logique d'Anouk tourne à plein régime pour reconstituer les piquets et monter le tout. Babeth trouve ça bien compliqué. Jacky l'appelle. Babeth revient et nous dit "bon, repliez tout, vous allez dormir dans notre gîte. C'est à 300 mètres et il n'y a personne en ce moment !". Ce soir, nous sommes donc passés d'une boîte de pâté à un appartement pour nous tout seuls ! Nous partons avec le sourire en balade par le haut de la ville sur un sentier qui longe l'ancienne frontière avec l'Italie et nous offre un merveilleux point de vue sur la vallée. Puis nous rentrons et retrouvons Babeth aux fourneaux, décidée à ne pas nous laisser mourir de faim ! Nous lui faisons découvrir notre carnet de voyage et Tripline, le site où nous retraçons notre parcours jour après jour. Jacky nous apprend d'ailleurs que nous ne pourrons pas remonter comme nous l'envisagions car plusieurs cols sont toujours fermés à cause de la neige. Après le repas, nous recevons la visite d'Annie, la voisine, qui a aussi beaucoup voyagé. "Alors les jeunes, vous êtes partis d'où ? Et que pensez-vous des zadistes ?"

La station après la saison

Le lendemain matin, nous retrouvons Babeth et lui offrons des nougats de Montélimar accompagnés d'un petit mot de remerciements. Elle remplit notre sac de nourriture et nous trouve deux chapeaux de paille. Déclinant une nouvelle proposition d'entretien chez une autre voisine qui aimerait nous rencontrer, nous préférons reprendre la route alors qu'il fait encore frais. Un charpentier nous descend dans la vallée et nous avance le plus qu'il peut, jusqu'à un croisement entre un pont et un tunnel, rejoignant la nationale. Nous comprenons que nous sommes très mal placés et que nous devons partir vite ! Heureusement, un père et sa fille nous font monter et nous avancent d'une quinzaine de kilomètres. Il est pâtissier dans un restaurant et habite sur la côte. "On paie cher le soleil ici" nous explique-t-il par rapport au prix des loyers. Il nous dépose en pleine ligne droite, mais il y a tout de même un endroit pour s'arrêter. Quelques secondes plus tard, Smaïn s'arrête. "J'ai bien aimé les chapeaux" nous précisera-t-il plus tard. Cet étudiant en ressources humaines est en apprentissage à La Poste et profite de quelques jours de vacances pour se rendre à la montagne. "Mes amis n'arrivent que demain, si vous voulez rester dormir dans le airb'n'b que j'ai réservé, vous pouvez !" nous propose le jeune homme pendant le trajet. Désireux de prendre notre temps et découvrir les paysages que nous traversons, nous acceptons l'invitation et nous retrouvons tous les trois dans une station de ski semi-déserte, avec les prairies des pistes de ski comme terrains de jeu. Smaïn et Pierre-Elie se décident à explorer les hauteurs et "aller toucher la neige" pendant qu'Anouk reste à l'appartement pour continuer ses démarches pour l'année prochaine. Un chien de la station les accompagne durant toute la balade et ils découvrent le bar du haut des remontées mécaniques, fermé bien sûr. Ils s'assoient dans la neige, contemplant les sommets avant de redescendre par un autre sentier. Nous passons ensuite la soirée à jouer aux dés et aux cartes avant de reprendre la route le lendemain. Smaïn se rend justement à Barcelonnette pour voir un ami et nous profitons du trajet pour avancer vers un nouveau département : les Hautes-Alpes !

Les Hautes-Alpes plein les yeux A Barcelonnette, c'est jour de marché. Nous déambulons dans le centre, avant de prendre le chemin du 05 et le col de Vars. Intrigué par notre outil, nous croisons un monsieur qui semble un brin remonté : "Ah vous allez biner ? Ah non, c'est pas pour jardiner ce que vous tenez là ?"

- "Non c'est une caméra, nous voyageons en France depuis octobre et là nous allons faire du stop en direction de Briançon !" - "Mais c'est super ! Non mais par ici vous ne passerez pas, avant on pouvez, mais là ils ont laissé des propriétaires hisser des barrières sans entretenir le chemin. C'est pour ça, je croyais que vous partiez vous en occuper !" Puis un papi sort de son jardin pour nous dire d'aller nous placer plus loin si nous voulons retrouver l'axe qui contourne la ville. Il clôt la discussion en blaguant : "l'avantage quand on est vieux, c'est qu'on a plein de potes âgés !" Grâce à un 4x4 et son chargement de foin, une voiture remplie de courses et un chef d'entreprise noyé dans le travail, nous passons le col de Vars et arrivons à Briançon. Nous prenons le temps de manger dans un parc avant de reprendre la route pour voir où le vent nous porte. Un secouriste-moniteur de parapente nous emmène ensuite dans la montagne en nous expliquant son amour de la montagne et ses différentes activités en fonction des saisons. Puis les aventures continuent avec Alberto, un Turinois installé en France depuis plusieurs dizaines d'années et responsable de chambres d'hôte depuis peu. Il nous fait écouter Fabrizio De André, un chanteur anarchiste italien, et nous arrivons ensuite à Gap où nous nous posons de nouveau dans un parc. Il est bientôt 18 heures et nous nous mettons en quête d'un hébergement. En passant devant une Biocoop, nous entrons demander les invendus au gérant et ressortons avec des brocolis et un poireau ainsi que des tartelettes aux pommes pour le goûter ! Puis nous abordons une première personne qui n'est pas de Gap, vient seulement chercher son fils au collège et retourne ensuite dans le 04 ! Argument suprême ! Car ce soir nous cherchons à dormir dans les Hautes-Alpes ! Alors elle nous indique le centre où nous nous dirigeons et rencontrons Lise, une éducatrice spécialisée, qui nous invite immédiatement à boire un coup dans un bar en attendant que son collègue la rejoigne. Nous discutons de voyages, du travail d'éduc et de la région qu'elle connaît seulement depuis octobre. Des "locaux" nous rejoignent ensuite et nous découvrons toutes les activités sportives générées par un tel relief. Ce qui n'est pas sans nous rappeler la bande des Baronnies et leur amour pour le Queyras ! Lise nous conduit ensuite chez elle, plus haut dans la montagne et Pierre-Elie lance un risotto aux brocolis entre deux tours de Bandido, un des nombreux jeux de société trônant dans le salon. Le lendemain matin, avant d'aller travailler, Lise tient à nous montrer la vue près de chez elle, où les montagnes se dressent à 360°. Nous nous séparons ensuite afin de continuer notre route vers l'Isère et la remontée des Alpes...


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